Discours annuel du Pape au Corps diplomatique
Le pape François cite les attentats de Paris dans son discours au Corps diplomatique près le Saint-Siège qu’il a reçu pour l’échange des voeux lundi 12 janvier 2015 : il y voit un des épisodes d’une guerre mondiale intermittente, et le symptôme d’une « culture de l’asservissement ». Le pape a aussi mentionné le calvaire du Nigeria où le terrorisme a fait plus de 2 000 victimes la semaine dernière.
Massacre à Paris et mystification de la religion
Le pape dénonce le terreau de la violence avec le rejet de l’autre, le rejet de Dieu, individuel et social : « À une dimension personnelle du refus s’associe ainsi inévitablement une dimension sociale, une culture qui rejette l’autre, brise les liens les plus intimes et les plus vrais, finissant par défaire et désagréger toute la société, et par engendrer la violence et la mort. Nous en avons un triste écho dans les nombreux faits de la chronique quotidienne, le moindre n’est pas le tragique massacre survenu à Paris, il y a quelques jours. Les autres « ne sont plus perçus comme des êtres d’égale dignité, comme des frères et sœurs en humanité, mais sont vus comme des objets » », a ajouté le pape.
Il y voit comme conséquence une forme moderne d’esclavage : « Et l’être humain, de libre devient esclave, que ce soit des modes, du pouvoir, de l’argent, parfois même de formes déviantes de religion. Ce sont les dangers que j’ai voulu rappeler dans le Message pour la récente Journée Mondiale de la Paix, consacré au problème des multiples esclavages modernes. Ils naissent d’un cœur corrompu, incapable de voir et de faire le bien, de poursuivre la paix. »
Le pape dénonce dans la violence terroriste une « mystification de la religion ». Il salue au contraire, le modèle albanais fait d’harmonie entre les religions comme « un signe important qu’une foi sincère en Dieu ouvre à l’autre, engendre dialogue et action pour le bien ». Au contraire, ajoute le pape, « la violence naît toujours d’une mystification de la religion elle-même, adoptée en prétextant des projets idéologiques qui ont comme unique but la domination de l’homme sur l’homme. Également, au cours de mon récent voyage en Turquie, pont historique entre Orient et Occident, j’ai pu constater les fruits du dialogue œcuménique et inter-religieux, ainsi que l’engagement envers les réfugiés provenant des autres pays du Moyen-Orient. »
Respecter la légalité internationale en Ukraine
Le pape diagnostique aussi une « vraie guerre mondiale qui se déroule par morceaux », et il cite l’Ukraine pour laquelle il appelle à la réconciliation : »Nous constatons avec douleur les conséquences dramatiques de cette mentalité du rejet et de la « culture de l’asservissement » dans le déferlement continuel des conflits. Comme une vraie guerre mondiale qui se déroule par morceaux, ils touchent, même si c’est sous des formes et avec des intensités variées, différentes zones de la planète, en commençant par la proche Ukraine devenue un théâtre dramatique d’affrontement, et pour laquelle je souhaite que, par le dialogue, se renforcent les efforts en cours pour faire cesser les hostilités, et pour que les parties en présence entreprennent dès que possible, dans un esprit renouvelé de respect de la légalité internationale, un chemin sincère de confiance réciproque et de réconciliation fraternelle qui permette de dépasser la crise actuelle. »
Attentats et esclavage au Nigeria
Enfin, il a mentionné et dénoncé la violence qui ensanglante le Nigeria, et les enlèvements de jeunes-filles : « Des formes semblables de brutalité, qui fauchent souvent des victimes parmi les plus petits et ceux qui sont sans défense, ne manquent pas non plus, malheureusement, dans d’autres parties du monde. Je pense en particulier au Nigeria, où les violences qui frappent sans discernement la population ne cessent pas, et où le phénomène tragique des séquestrations de personnes est en croissance continue, souvent des jeunes filles enlevées pour faire l’objet d’un trafic. C’est un commerce exécrable qui ne peut pas continuer ! Une plaie qu’il faut éradiquer car elle nous concerne tous, depuis chaque famille jusqu’à la communauté mondiale tout entière. »
Le pape n’en a pas moins mentionné d’autres « indicibles souffrances » notamment en Afrique : Lybie, République Centrafricaine, Soudan du Sud, Soudan, Corne de l’Afrique, République Démocratique du Congo…
■Anita Bourdin, Rome, 12 janvier 2015 (Zenit.org).